article par Elodie BUISSON "Vers une aire de jeu. Le sessad comme espace trouvé-créé"

équipe administrative ADSPF • 30 mai 2025

LE JOURNAL DES PSYCHOLOGUES

EXTRAIT parution 2013 

Eprouver les limites de l’espace de thérapie et jouer avec… pour parvenir à jouer ou à rejouer, tout simplement… Ce pourrait être le début d’un travail psychothérapique qui permettrait aux enfants de se poser dans un espace trouvé-créé ? de pouvoir jouer psychiquement avec la réalité et la transformer dans des jeux imaginaires ? Les suivis de Thomas et de Ryan viennent illustrer la mise en place d’un tel espace de jeu au sein d’un sessad.

« Moi, au sessad, je suis là pour jouer » me dit, lors d’une séance, Thomas avec un brin de provocation, comme il sait si bien le faire. Dans un premier temps, je me dis qu’il m’agace profondément, puis je repense aux séances précédentes. Thomas a presque neuf ans, il est surnommé le « tourbillon » par son père. Il a été orienté au sessad par l’école lors de son redoublement de grande section de maternelle, en raison de son retard scolaire, mais aussi de ses troubles du comportement. À l’école, il est bougon, il se bagarre et a du mal à apprendre. À la maison, il ne se fixe sur rien et fait ce qu’il veut, comme il veut. Il est en classe pour l’inclusion scolaire (clis) depuis deux ans, car il n’arrive pas à apprendre à lire, mais ne présente aucune déficience. En revanche, il n’aura de cesse de se traiter, lors de nos rencontres, d’« handicapé », de « débile »… Lors d’une séance (après une année de rencontres hebdomadaires), il va s’appliquer à coller du Scotch au sol et à former ainsi un immense carré dans la pièce. Il propose un jeu où il est le meilleur catcheur du monde, il me donne le rôle de l’arbitre qui va lui remettre la « ceinture du monde » et l’applaudir à tout-va. Il me dit alors de ne surtout pas entrer dans sa surface si je ne veux pas me faire « massacrer ». Nous jouons entre le dedans et le dehors du carré de Scotch. Lors d’une séance suivante, Thomas me montre comment il écrit maintenant, je lui fais remarquer que son écriture est plus petite, plus sûre. À la fin de cette séance, Thomas veut emporter l’enveloppe qu’il a faite avec du papier et dans laquelle il a plié la feuille sur laquelle il a écrit son prénom de façon appliquée. Je refuse qu’il l’emmène chez lui, lui rappelant la règle qu’il a, auparavant, plusieurs fois interrogée. Mais, cette fois-ci, il s’énerve, se lance dans une litanie de gros mots, qui sont toujours très présents dans son discours. Il finira par me dire qu’il va la cacher dans le placard du bureau. Je le raccompagne alors à la porte du service. Je pense, à cet instant, que nous avons pu trouver un certain compromis : l’enveloppe est restée dans le bureau, mais c’est lui qui lui a trouvé sa place. Il met son blouson et là me montre à mi-mots qu’il a mis l’enveloppe sous son tee-shirt, coincée dans son pantalon ! Je me fâche, lui rappelant qu’il m’avait dit qu’il la laisserait dans le placard. Il acceptera alors de me la remettre : cette fois, c’est notre enveloppe qui semble jouer entre le dehors et le dedans du bureau ! Lors de notre rencontre suivante, Thomas arrive avec des billes. Il s’installe dans le carré de Scotch, me propose de le rejoindre et de jouer ensemble. Il explique la règle (c’est la première fois !) : il faut toucher la bille de l’autre et ainsi la gagner ; à la fin de la partie, on compte celui qui en a le plus. Il joue avec le désir de gagner, mais supportera de perdre. Au bout d’un certain temps, je suggère de laisser de côté les billes. Je lui fais remarquer qu’il m’a montré qu’il était plutôt habile et bon dans ce jeu. Il va alors chercher les Playmobils, me tend une voiture et deux personnages. Je dois rouler à toute vitesse, en ayant bu de l’alcool. Il est la police qui doit m’arrêter. Police qui mettra d’ailleurs beaucoup de temps avant de stopper la voiture et de mettre les deux personnages en prison. Il placera alors une quinzaine de personnages devant la prison, m’expliquant qu’ils sont très en colère. À ce moment, il me demandera qui a peint le tableau dans mon bureau. Je lui propose de lire le nom du peintre écrit en dessous du tableau. Il lira fièrement « Miro ».

La clinique des enfants accueillis

Notre sessad accueille des enfants de trois ans à seize ans qui souffrent de troubles du comportement et de déficiences légères ou moyennes. Si cette définition est celle de l’agrément qui a été octroyé lors de la mise en place du sessad, il nous faut nous questionner sur la « problématique » des enfants que nous accueillons. Mais arrêtons-nous sur ce terme de « problématique » qui est un terme maintes fois repris tout au long d’une journée de travail ! Car, déjà, il suppose une certaine prise en compte de la souffrance de ces enfants. Jacques Hochmann, renvoyant au modèle médical, préfère se référer à la « psychopathologie » comme base théorique pour évoquer le travail des professionnels qui observent ce qui fait conflit, nœud de souffrance, ce qui empêche, entrave, un bon développement de l’enfant, ses apprentissages scolaires… Nous évoquons aussi souvent la « clinique » des enfants accueillis pour comprendre, pour nous représenter les enjeux, les travers, les défenses, le mode d’entrer en relation avec l’autre, mais aussi les angoisses de l’enfant et de sa famille. Ces deux notions font référence à des théories psychanalytiques. Lorsque je dis « nous », je parle, bien sûr, de l’ensemble des professionnels qui se donnent pour mission première, au sessad, de prendre le temps d’observer l’enfant qu’ils rencontrent.

Un des auteurs auquel nous nous sommes beaucoup référés pour comprendre les enfants accueillis au sessad ainsi que leurs familles est Roger Misès et son travail sur « les pathologies limites » de l’enfant. Il dit préférer cette terminologie à celle d’« état limite » pour marquer la potentialité évolutive chez ces enfants. Il repère alors différents aspects psychopathologiques (Misès, 1990) :

  • un défaut d’étayage ;
  • un défaut d’élaboration de la fonction de contenance ;
  • n défaut de régulation des rapports entre processus primaire et processus secondaire ;
  • un défaut d’élaboration de la position dépressive ;
  • un échec dans le registre de la transitionnalité.

Si l’on s’attache particulièrement à ce dernier point, Roger Misès note qu’il est un fait essentiel. Il rappelle, en référence à Donald W. Winnicott, comment le bébé, dans un premier temps, va s’illusionner et penser que c’est lui qui crée l’objet et ses premières représentations dans une certaine omnipotence. Puis, plus tard, il va devoir reconnaître que l’objet est en dehors de lui, ce qui le conduit à un certain désillusionnement, il va alors être dans un mouvement de destruction de l’objet pour pouvoir s’en trouver / créer une nouvelle représentation plus secondarisée. Au sessad, nous rencontrons des enfants qui sont toujours dans cette illusion persistante d’un pouvoir omnipotent. Ils ont du mal à pouvoir jouer seul en présence d’un autre, le jeu est souvent agité, décousu dans une certaine excitation. La question de la séparation ne peut se transitionnaliser et ne peut être vécue que dans la rupture.

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